Une porte se ferme au Cercle Wagram. Le juge d'instruction en charge du dossier a décidé de clore une partie de son enquête. Mais la saga du Cercle de Jeux n'est pas encore achevée.
C'est une étape. Tout un pan de l'enquête sur le Cercle Wagram, établissement de jeux parisiens soupçonné d'avoir été le théâtre d'une lutte entre héritiers du gang corse de la Brise de Mar, est désormais clos.
En charge des enquêtes pour extorsion, blanchiment et association de malfaiteurs en bande organisée, le juge d'instruction Serge Tournaire a signé une ordonnance de soit-communiqué aux fins de réglement, le 13 avril dernier. Ce document, que Bakchich a pu consulter signifie que le magistrat estime son instruction aboutie et renvoie désormais la balle au parquet de Paris, afin qu'il prenne des réquisitions.
Un Cercle dans l'héritage de la Brise
En l'occurence, il s'agit du volet dit du «Wagram II». Le 19 janvier 2011, le Cercle reçoit des visiteurs un peu nerveux. Selon les surveillances téléphonique du Service Central des Courses et Jeux, les patrons des lieux sont priés de déguerpir au plus vite, sous peine de rencontrer quelques soucis.
Bien aimables la direction du renseignement de la Préfecture de Police de Paris transmet les photos de ces «messagers» particuliers, assorties de leur CV, bien connu des services judiciaires. « Une équipe montante de malfrats défendant de façon violente le patrimoine et les investissements occultes de leur mentor feu Casanova », décrivent les enquêteurs du Wagram, dans un rapport du 17 février 2011.
Sont cités Jean-Luc Germani, beau frère de Richard, Antoine Quilicchini, dit «Tony le Boucher», ou encore Stéphane Luciani et Fréderic Fédericci, petit frère d'Ange Toussaint. Les accompagne notamment Philippe Terrazzoni, ancien directeur des Jeux du Wagram, évincé fin 2009 et qui revient alors aux affaires. Jusqu'à ce que la police ferme l'établissement en juin 2011.
Si Terrazzoni et Quilichini dorment encore en prison, Germani, Luciani et Fédéricci courent eux toujours la campagne, malgré les mandats d'arrêts lancés à leurs encontre et le lourd soupçon qui pèse sur leur rôle dans la guerre qui ensanglante le milieu corse depuis 2006... sur laquelle le dossier du Wagram lève - un peu- le voile. Au moins sur les dissensions qui ont vu le jour au sein de la Brise.
A la mort de Richard Casanova, fin 2008, le Cercle passe peu à peu sous la coupe d'un autre ponte de la Brise de mer, Francis Guazelli, avant que fin 2009, ce dernier ne tombe aussi sous les balles. Son frère Angelo en prend alors les rênes, dans l'ombre. Et début 2011, les proches de Casanova, fâchés d'avoir été évincés, réalisent un coup de force en vue de récupérer ce si lucratif - et si liquide- business.
Les déclinaisons du Wagram
La cloture des investigations sur le déroulement du coup de force ne signifie pas la fin de la saga du Wagram, que Bakchich a largement déroulé. Demeure encore à faire la lumière sur le dossier dit «Wagram I», et ses déclinaisons.
Les policiers des courses et jeux se sont intéressés dès décembre 2010 aux particularités du management de la direction du Cercle, habituée à rémunérer ses employés en liquide, voire à envoyer des enveloppes de cash en Corse, à destination de la famille Guazzelli, comme l'a confirmé le «Transporteur». Arrêté et mis en examen, le maire de Petralba Jean Casta a avoué aux enquêteurs, en mars dernier, avoir joué le rôle de convoyeurs à de nombreuses reprises pour les Guazzelli. D'abord Francis puis à la mort de celui ci, son frère Angelo, en détention depuis 3 mois.
Les relations entre les services de police et le Cercle de Jeux ont ajouté un peu de piment au dossier. L'ancien président de l'association du Wagram a connu un première vie de flics des RG, chargée du contrôle des casino.
Honoré Renon dort en prison depuis mars, en compagnie de Jean Testaniere, alias le Mage, consulté par des vedettes du show-biz et de la politique pour ses talents de divination et ancien secrétaire du Wagram. Les deux hommes ont décrit, avec un naturel désarmant, prendre leurs ordres auprès d'Angelo quand il s'agissait d'embaucher du personnel.
Fantasme maçonnique
Un petit grain politique a fini de colorer l'affaire quand François Pupponi, le maire de Sarcelle, a été accusé par l'un de ses employés de l'avoir menacé au nom du grand banditisme corse. Placé sous le statut de témoin assisté, le député maire de Sarcelles nie avec la plus grande vigueur les faits, allant même comme l'a révélé Le Point, jusqu'à évoquer un complot maçonnique à son encontre. La théorie est partagée par une autre grande personalité citée dans le dossier, l'ancien patron de la DCRI Bernard Squarcini. Proche de la barmaid en chef du Cercle, le maître espion a longuement répondu aux interrogations du juge Tournaire, le 12 avril, se déclarant même ravi, en fin d'interrogatoire «d'avoir pu apporter cet éclairage» sur ses relations avec les mis en examen du dossier.
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